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A difficult man [Swansea]



22.12.21 21:56

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"Et l’on n’a plus besoin de personne"
Guillaume Apollinaire




Le poids de Lady Rodgers sur l'âme de son infant déclinait enfin. Elle avait succombé, sans doute. Il avait longtemps contemplé les flammes dans l'âtre en y songeant, puis il avait décidé de penser à autre chose. Complètement autre chose. La vie, par exemple. Il n'aurait pas eu d'idée, mais quelqu'un lui en avait soufflé une, sans en avoir conscience, probablement. Allait-il lui en être reconnaissant ou lui en tenir rancune avec le temps ? L'avenir le dirait. Tommen avait surtout l'impression de faire un saut dans le vide.

En réalité, il attendait, devant chez lui, qu'une dame vêtue du même manteau noir à capuche rabattue qu'il portait également le rejoigne, avec un chargement bien particulier. Ils étaient impossibles à distinguer l'un de l'autre, par cette nuit épaisse et brumeuse, lorsque la femme lui remit son prisonnier. Tommen se faisait passer pour un autre intermédiaire. Celle qu'il avait engagée pour cette brève tâche ne saurait jamais rien de plus.

"Je vais le conduire au client, comme convenu," dit-il simplement en prenant par le bras le captif dont les mains avaient été attachées dans le dos. Comme c'était donc déplaisant... Mais il aurait tout le temps pour les formalités plus tard. Il attendit que l'intermédiaire ait disparu, et se contenta de pousser la porte d'un immeuble comme tous les autres, sans signes particulier au sein du district Fraser. Il descendit un escalier de service qui semblait conduire au local des poubelles, mais tout en bas, une porte grise marquée d'une petite pancarte "danger" ouvrait sur ses appartements. Le jeune homme tenait bien le coup pour quelqu'un qui pourrait légitimement craindre d'être conduit dans un abattoir, ou autre élevage souterrain peu recommandable.

Mais c'était pour cette raison qu'il était là : pour son attitude provocatrice. Il était temps de se mettre un peu en difficulté. Et quitte à étudier l'être humain de plus près, autant que ce soit un spécimen capable de regarder l'adversité la tête haute. Tommen avait toujours considéré ce genre de plaisantins comme des artistes à part entière. Il n'avait pas pour rien dans sa bibliothèque les Caractères de La Bruyère, les mots d'esprit d'Oscar Wilde ou les Voyages de Gulliver : la satire en situation de tyrannie le fascinait comme l'un des jeux les plus gratuits dont l'humanité se soit montrée capable, durant les quelques siècles où il avait cohabité avec elle. Exercice mesquin aussi, et qui ne satisfaisait pas son caractère morne et austère en tant que pratique, mais qui le questionnait en tant que spectacle.

L'appartement s'ouvrait sur un salon des plus classiques, que l'on aurait pu qualifier d'edwardien. Une porte donnant sur un bureau où il remisait ses possessions les plus personnelles, dont certaines acquises plus ou moins légalement. Un ou deux tableaux aux murs, des étagères où figuraient des rangées de livres, une cheminée éteinte au manteau couvert de bibelots, généralement en pierre. Les mauvaises langues prétendaient que mis à part les chiffres et les abstractions, dans le monde matériel le Conseiller n'aimait que les pierres – les plus vulgaires disaient qu'il "suçait des cailloux". Il est vrai que ces objets, dont il ne possédait que quelques exemplaires bien choisis, lui étaient aussi chers que tous les souvenirs qu'ils cristallisaient. Chers, en terme d'attachement. Tommen ne dépensait pas des mille et des cents pour des objets, c'était contraire à toutes ses doctrines. Même ce prisonnier dont il détachait à présent les poignets n'avait pas coûté bien lourd. Autre caractéristique qui avait motivé son choix, il fallait bien l'admettre.

"Je suis navré que l'on vous ait brutalisé. Vous avez eu raison de riposter, en revanche," déclara-t-il, ayant appris que le jeune homme avait frappé le marchand qui le palpait comme un cheval de bât. "Moi-même, je n'aurais pas toléré un tel excès de contact."

L'attache sitôt défaite, il le démontra en se reculant de deux pas, et jeta le lien au feu. Il n'en aurait plus l'usage. Feu qu'il alluma lui-même avec l'aisance d'un vampire habitué à manipuler cette périlleuse substance, en observant la distance nécessaire pour éviter tout réflexe de terreur. Mais peut-être aurait-il dû ordonner au mortel de s'en charger. Ah, damnation, il ne savait pas quoi faire de cette présence. Il avait tant coutume de vivre reclus et paisible, dans un confortable silence, que la nécessité de diriger lui paraissait épuisante à l'avance.

Il y avait quelqu'un chez lui tout à coup. Brrr... Comment faisait donc King, l'aubergiste ? En quoi cela pouvait-il être si plaisant ? Il allait bien finir par trouver.  Retirant son manteau noir, il apparut dans son habituelle tenue de bureau. C'était déconcertant d'être suivi par ce regard chargé de questions. Il était pourtant égal à lui-même...

"Oh, le client ? C'est moi. Je ne souhaitais pas que cette dame sache où je vis, à quoi je ressemble et pire encore, mon nom. Je m'appelle Tommen Hodgkin et je travaille au Conseil." Aucune tentative pour sourire, King justement avait eu l'air de suggérer que son sourire n'était pas engageant du tout. Mieux valait incliner légèrement la tête avec ce bref clignement de paupières que les chats, universellement, comprenaient comme une salutation. "Enchanté."
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31.12.21 19:07

Aloysius Swansea
A difficult man [Swansea] 02f098555aa24dd4501b5097bb5108e46b81724d
֎ Diem natalis : Libre.
֎ Officium : Dominic C
֎ Matricule : NA5038901
֎ Nuntium : 893
֎ Adventus : 17/08/2018
֎ Multicomptes : None
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Aloysius Swansea
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« A difficult man  »





Le désappointement du sauvage était total  - Voilà que son destin prenait une tournure des plus calamiteuse. A son grand dam, il subissait ce qu’il avait réussi à éviter pendant de nombreuses années. L’homme autrefois libre ne l’était plus : désormais, il était objet. L’objet d'un marché lucratif et abject - Le trafic d'esclaves.

Il y avait foule, en bas de l'estrade. A tel point que les visages d’albâtre se confondaient. Face à cette multitude, Swansea resta de marbre. Il ne chercha pas à se vendre, à contrario de ses semblables serviles. Non, vraiment ; lui aurait préféré disparaître. Ne plus entendre la cacophonie ambiante, ni le sketch du mercanti qui le jouxtait. Maquignon qui finit d’ailleurs par se ramasser une torgnole magistrale. Aloysius ne supporta pas ses élans tactiles, l'autre flattant sa carcasse pour souligner sa bonne condition physique. Le bourre-pif asséné souleva l'indignation de la populace, l'enchère s'en retrouva statufiée. Qui pour acheter tel effronté ? Les récalcitrants ne plaisaient guère : Mater un esprit révolté prenait du temps. Tandis que dociles ne discutaient pas, pas plus qu'ils ne ripostaient - ils se contentaient de servir et puis c'était tout.


Malgré tout et contre toute attente, l'impudent trouva acquéreur mystère. " T'as d'la chance, j't'aurais envoyé au gibet moi ! " Siffla serpent amoché, tandis qu'un employé entraîna Al’ à l'écart. S'en suivirent formalités ; l'attribution d'un matricule, ancré jusque dans la couenne de sa nuque. Marquage à vie. Une fois ses paluches rivetées, un quidam drapé d'obscur le prit en charge. Le conduisit à travers la ville, le pas pressé, pour le refiler à un autre individu - Procédé pour le moins déroutant.  

La lourde d'un bâtiment franchie, ils s'enfonçèrent dans les profondeurs d'un sous-sol. Le nouvel enregistré - qui dissimulait son appréhension sous une assurance feinte - laissa échapper un soupir fébrile lorsque son guide ouvrit la seconde porte. Derrière celle-ci, ni salle de torture, ni être chthonien. Mais un logement minimaliste. L'intermédiaire prit la parole. Sa voix rauque, comme un raclement de pierre, s'éleva dans la pièce. Al' lui répondit, caustique ; « J’ignorais que dans cette cité, l'on cultivait la compassion.  »

Le nervi délia ses entraves, alla ensuite s’afférer auprès du foyer. Si Al' considéra un instant le gazier encapuchonné, bien vite son attention se porta sur le décorum. Son regard s'en alla courir sur le mobilier, remonta jusqu’aux ouvrages alignés. S’arrêta un instant sur quelques bidules dont il ignorait l’utilité. L’absence d’ouvertures sur l'extérieur était malaisante, il n’y avait aucune issue en l’endroit - mise à part la porte d’entrée. Porte qu'il reluqua du coin de l'œil ;  L'autre ne l'avait pas verrouillée.


Surpris, Swansea esquissa un mouvement de recul lorsque le soi-disant chargé de mission ôta pardessus et capuchon. Face à lui, se tenait désormais un colosse en complet, au visage émacié et à la carnation livide. Celui-ci se présenta, leva le mystère. Le faciès de l'éphémère se contracta sensiblement ; Cette mise en scène sous couvert d’anonymat…  « C’est d’un grotesque .. » Lâcha le solitaire dans un souffle. A quoi rimait tout ce cirque !?

Se reprenant, Al’ darda sur l’autre un regard orageux. Sans faire l’effort préalable de civilités, il passa directement à l’attaque - Ce Tommen subirait les conséquences de son acte ; il ne fallait pas l'acheter ! « Je m’évaderais. Lorsque votre attention sera branlante.. Je retournerais dans la bordure. D’ici là, n’attendez pas de moi une dévotion exemplaire. Je ne suis pas comme ces autres qui n’ont d’yeux que pour leur… ‘Maître’ .. » Il dégueula le terme avec dégoût. « Vous et moi  sommes diamétralement opposés. Rien de bon ne pourra résulter de cette cohabitation forcée. » Son avis était tranché. Parce que, non seulement son interlocuteur était un nocturne, mais en plus, il s’agissait d’un notable. Sur quoi pourraient-ils s’entendre, puisqu’ils n’avaient strictement rien en commun ? « Matricule 5238901. Désolé, mais vous avez fait mauvaise pioche.  » Pour seule identité, une série de chiffres. Après tout, n’était-ce pas ce qu’il était maintenant, aux yeux de cette communauté ? Derrière son attitude bravache, déjà son coeur tanguait. A craindre de devoir vivre pour toujours dans ce caveau aménagé. Où tout était trop propre, trop carré, trop rangé. Loin de la douceur du soleil, de la brise, et du chant des oiseaux - L'extérieur lui manquait déjà.  





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« Volubilis, bien que tu fanes, l'aube se lèvera encore » Gengen'ichi

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31.12.21 23:31

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Les sourcils haussés, le Conseiller put constater de ses propres yeux qu’on ne lui avait pas menti : cet homme qu’il venait d’acquérir avait un caractère tout à fait prononcé, voire antagoniste. Il n’avait pas sa langue dans sa poche et il ne semblait disposé à faire aucun compromis avec sa nouvelle situation. Mais bien sûr, ce pouvait être simplement une manifestation de son sens des affaires. On réclame toujours cent couronnes quand on souhaite marchander jusqu’à cinquante.

« J'apprécie votre hardiesse, mais ne m'appelez pas grotesque, c'est un mot qu'on utilise mal à cette époque. »

En longeant le mur à pas lents, comme s’il cherchait quoi faire de sa personne – ce qui était à peu près le cas – Tommen tapota du bout des doigts sur le dictionnaire posé sur le manteau de la cheminée. Une impression très complète du fameux Corpus CNRTL dans trois langues, avec d’innombrables sources étymologiques. Il y avait beaucoup à apprendre d’un tel ouvrage. Dans son référentiel d’origine, le mot grottesque (avec deux t, et pour cause) signifiait : digne des fresques de la Domus Aurea. Il ne demandait pas à son invité de le savoir mais quitte à l’insulter, autant le faire avec des outils fonctionnels, dont ils auraient tous deux la même compréhension. S’il devinait bien, le reproche exact n’était pas « grotesque » mais quelque chose comme… procédurier. Il croyait comprendre qu’on pensait souvent ça de lui, sans forcément le dire à voix haute.

« Croyez-vous par hasard que je vous aie acheté parce que j'avais besoin d'un ami? Je sais m'en faire, figurez-vous. »

C’est qu’il était réellement vexant quand il se voulait, ce garçon ! Enfin, ce n’était sans doute pas ce qu’il avait voulu suggérer. Par moments, son maître était un peu cassant. Pas de réelle paranoïa, il l’espérait, mais cette méfiance naturelle de ceux que l’on aurait trop intérêt à mettre à terre, et un peu plus que cela. Disons qu’il n’avait jamais imaginé une entente parfaite, surtout assortie de cohabitation. Il y avait ceux qui étaient faits pour ça, et il y avait Tommen Hodgkin. Dernièrement, il voyait l’un de ses amis beaucoup plus souvent et il en était le premier étonné. Il faut dire qu’un danger de mort rendait tout le monde plus conciliant.

« Si vous voulez bien, je prononcerai 523-8-901. Je mémoriserai plus facilement ainsi. » Après une seconde de réflexion, Tommen secoua la tête. Il était parfaitement sérieux ; pourquoi n’aurait-il pas pris l’annonce du nouvel esclave au pied de la lettre ? Respecter la manière dont une personne se désignait était la base de toute communication. En revanche, il y avait une légère modification à apporter. « Je n’aime pas qu’on raccourcisse les noms mais le vôtre est trop long, permettez-moi de l’abréger en Matricule 5. Et je vous en prie, asseyez-vous. Oh, j’y songe… Que buvez-vous ? Généralement ? »

De l’eau. Des boissons améliorées. Des fruits pressés, du sucre liquide, du lait. De l’alcool ? Absolument pas du sang. Tommen se sentait un peu démuni, il avait prévu la méthode pour ramener la créature mortelle à son domicile sans s’attirer des difficultés, mais quant aux soins dont celle-ci pouvait avoir besoin, il se rappelait soudain à quel point il était peu apte. L’image de son congénère de l’auberge, éternellement partagé entre des reproches indignés lorsqu’il se montrait un parrain résolument indigne, et la promesse qu’il ne l’était pas entièrement, lui apparut en tête comme un flash quelque peu déstabilisant.

Du calme. Pas de quoi être nerveux. Ce n’était qu’un adulte cette fois. Ça n’aurait rien de complexe et on lui avait garanti qu’il était en bonne santé. Quelques traitements, peut-être pas mauvais, mais approximatifs, ne laisseraient pas une trop profonde empreinte. Et le vampire apprendrait rapidement : pour ce qui est de mémoriser des listes par cœur, il se faisait entièrement confiance.

« De toute façon je devais sortir. Tenez, dormez un peu et je ramènerai le nécessaire. »
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10.01.22 0:19

Aloysius Swansea
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« A difficult man  »




Hématophage se méprenait ; Ce n'était pas lui qui était grotesque, mais sa démarche alambiquée. A aucun moment Aloysius laissa supposer que le besoin amical de Tommen justifiait son achat  ; il ne fit qu'évoquer son aversion pour les esclaves conquis. Bien vite, la trogne de l’humain passa de la surprise à la perplexité -  Mais sur quel olibrius était-il donc tombé ?

Enregistré ne bougea pas d'un iota lorsque Hodgkin l'invita à s'asseoir, mais chipota lorsqu'il l'interrogea sur ses habitudes de consommation. A croire qu'il cherchait querelle. « Attendez, vous êtes sérieux ? Que boivent les humains, selon vous ? Qu’est ce que vous buviez, quand vous en étiez un ? De toute façon je ne veux rien. » Il se comportait comme un visiteur qui ne comptait pas s'attarder. Je ne veux rien car je vais m'en aller.

Sauvage avait pourtant de la chance dans son malheur ; il aurait très bien pu tomber sur un détraqué, un tyran, ou un pervers. Ou les trois à la fois. Un individu particulièrement sinistre qui lui aurait fait ravaler son bagou. Mais il n'en était rien et son acquéreur, malgré son excentricité apparente, cherchait vraisemblablement à le mettre à l'aise - C'était peine perdue.

Lorsque l'immortel annonça devoir sortir, une lueur éclaira les orbes de Swansea ; l'idée d'une éventuelle fuite se fraya un chemin jusqu'à son esprit. Quand bien même la porte soit fermée à clef.. Se pouvait-il qu'il y ait un double, là, quelque part, rangé dans un tiroir ou derrière un bibelot ? A défaut, ne pourrait-il pas tenter de forcer la serrure de la lourde ? Il l'avait déjà fait, dans la bordure, pour pénétrer d'antiques bâtiments abandonnés.

« Comment voulez-vous que je dorme dans ces conditions ?  » Lion en cage écarta les bras et les laissa retomber. Jouant le jeu du résigné, il se dirigea vers un fauteuil et sans précaution se laissa choir lourdement dans celui-ci - Le mobilier couina sous le traitement infligé. Il se pencha en avant, posa ses coudes sur ses genoux et enfouit son visage entre ses mains. Le regard dirigé vers le feu qui commençait à crépiter dans l'âtre, il dit ; « Quelle saveur aura la vie, enfermé ici. D'une amertume inégalable, à n'en point douter. Puis reportant ses agates sur le vampire ; « Et bien allez-y, je ne vous retiens pas. Son empressement était suspect. Peu probable que je puisse m'échapper ce soir, n'est ce pas ?  » Fit-il pour rassurer l'autre, l'encourageant ainsi à s'absenter.





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10.01.22 12:16

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"Il me semble que je buvais du thé... Je devrais pouvoir trouver de quoi faire des infusions. Je ne pourrai pas vous faire goûter le même thé tibétain parce que, oh, disons simplement que ce Tibet n'existe plus."

Tommen n'était pas inquiet : pour l'heure, son captif n'allait certainement pas s'échapper. Et pour cause, il ne comptait pas partir bien loin. Uniquement jusqu'à l'agence d'hommes à tout faire au bout de la rue, qui était sa solution ordinaire lorsqu'il avait besoin de services qu'il ne pouvait se rendre lui-même. En s'avançant vers la porte, il s'immobilisa et observa son environnement quotidien. C'était tout à fait injuste de critiquer ainsi ses appartements : on pouvait dormir partout, ici. Il y avait même une cheminée, ce qui n'était pas donné dans un lieu occupé uniquement par un vampire.

"En revanche, je sais parfaitement que pour dormir, je me couchais et je fermais les yeux. Si vous ne savez pas faire ça, je ne peux rien pour vous. Mais pour ce qui est de voir du pays..."

La clé s'agita dans sa main. Il hésitait. Proposer une sortie n'aurait pas été raisonnable. Rien de bon ne pouvait sortir de présents trop précieux adressés à un ingrat. On n'achetait que sa chute ainsi. Et puisque ce monsieur s'estimait pour ainsi dire en état de guerre, sans doute tous les coups étaient-ils permis ; une randonnée à l'extérieur était déjà un danger en soi, pas la peine d'en rajouter. Tommen observait la posture prostrée de l'esclave, son expression quelque part entre l'huître close et le furet en quête d'une faille. Il aurait aimé dire quelque chose qui l'aurait ramené à une forme de sérénité, mais puisqu'il ne savait pas comment faire, il ne tenta finalement aucun effort.

"Non, vous êtes encore trop hostile. Contentez-vous du gramophone, pour l'instant."

Il enclencha la lecture d'un disque à saphir qui égrénait une mélodie persane, lente et méditative, et se retira en attachant le col de son manteau. Sur le pas de la porte, il précisa qu'il s'agissait d'une histoire vraie, et sortit en faisant tourner trois fois, ostensiblement, la lourde clé dans la serrure. Alors que son pas s'éloignait dans l'escalier de service, remontant vers la surface, une voix s'éleva, lente et envoûtante. Il ne l'avait pas dit, car il ne comptait pas se confier si facilement avec cet individu qui le repoussait de tout son être ; mais c'était la voix de Lady Rodgers, enregistrée au temps des premiers cinématographes, et offerte en présent, parce qu'elle ne pouvait pas venir lui rendre visite sur son éternel chantier de construction.

"Lorsque Kavus fut rattrapé par ses crimes, ses ennemis lui annoncèrent qu'ils le laisseraient mourir de froid dans la cellule de prière où ils l'avaient enfermé. Il usa de la dernière volonté des mourants pour réclamer un tombeau comme nul n'en avait jamais connu. On lui bâtit une tour creuse, haute de soixante mètres, dans la plaine désolée, où de toutes parts on apercevait sur l'horizon cette aiguille de brique rouge qui transperçait les cieux. Au sommet de la tour, selon la tradition, sa dépouille fut exposée aux oiseaux, afin qu'ils portent à travers les cieux tout ce qu'il avait été de son vivant. Selon son voeu, Kavus avait été placé dans un cercueil de cristal. Et lorsque le soleil surplombait la tour, l'emplissant de ses rayons, il jetait dans tout l'édifice les couleurs crues et sanglantes de la dépouille déchiquetée, animées du battement des ailes et de l'ombre des oiseaux. Ainsi fut-il, jusqu'à ce qu'il n'en restât rien."

La musique iranienne qui avait accompagné discrètement le lent récit monta en puissance, envahissant la pièce et répercutant ses échos mystérieux au long des bibelots rapportés des quatre coins du monde. Les autres disques, les innombrables livres, et surtout les pierres, brutes, taillées ou sculptées. Un petit tableau encadré ici, une carte ancienne là, une vieille arme devenue coupe-papier, un vieil objet de culte devenu presse-papier. La grande armoire dont il avait tiré son manteau, la laissant entrouverte à dessein, conscient que le totem mustélidé qui s'exprimait actuellement chez l'invité involontaire réclamerait peut-être de fouiller pour se distraire.

Le vampire de son côté envoyait un commis lui chercher "tout ce dont un humain sans bagages peut avoir besoin pour sa survie quotidienne", et se postait devant sa demeure, immobile sous son capuchon noir, comme en prière. Il attendait, curieux. Non, en effet, l'esclave n'allait tout de même pas s'enfuir dès le premier soir... N'est-ce pas ? Une pluie froide ruissela bientôt du rebord du capuchon, mais tout ce qu'il parvenait à se demander, c'était : que pense-t-il de Lady Rodgers ?
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29.01.22 20:05

Aloysius Swansea
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« A difficult man  »




Un, deux, trois, tu ne sortiras pas cliqueta la serrure, lorsque l’Obscur prit congé. Aloysius serra la mâchoire, contrarié ; Un cylindre profondément engagé dans son encoche était - pour ainsi dire - impossible à forcer.  L'enregistré posa son regard courroucé sur la machine mise en branle dans le but de le distraire. Il se leva, s'en approcha. Aurait pu la détruire, par vengeance ou par colère, mais n'en fit rien. Il se contenta d'observer le mécanisme, l'étudia succinctement. Du bout de l’index, il toucha le disque qui tournait lentement, ce qui provoqua une distorsion musicale brutale ; Il sursauta. Dans d’autres circonstances, il aurait sans doute prit le temps de découvrir minutieusement cette curiosité, d’en apprécier la fantaisie - cela était nouveau pour lui. Et il était avide de découvertes. Or, l’heure n’était pas encore à la distraction.


Il se mit à fouiller le logement, à la recherche d'un double de clé, ou de tout autre objet susceptible de lui servir. Alla même jusqu'à lorgner l’intérieur des décorations creuses, les reposant à leur place sans aucune délicatesse. Hâtif dans sa démarche, il cassa involontairement un fétiche en verre. Conscient que le nocturne remarquerait tôt ou tard la pièce manquante, il ne chercha pas à cacher les traces de son méfait. Il déposa les morceaux brisés sur un élément du mobilier.

Il passa ensuite l'armoire au crible, farfouilla son contenu, défaisant les plis parfaits des étoffes qui y étaient rangées. Bredouille, il s’exila dans la pièce annexe. Jeta son dévolu sur le bureau ; ouvrit les tiroirs, n’y découvrit que des dossiers et des paquets de feuilles griffonnées. Il tomba sur la lame à l’usage détourné ; il s’en empara. Tenta désespérément et sans grand espoir de s’en servir - Il malmena maladroitement la serrure, jusqu'à ce que le coupe-papier casse dans l’embrasure. Frustré, le sauvage donna un coup de poing dans la porte. Il n’y avait rien à faire, il était piégé là. Et il lui faudrait faire preuve de patience avant d'espérer pouvoir se faire la malle. Gagner la confiance de l’autre, essayer de se montrer conciliant. Jusqu’à ce que son acquéreur le trouve moins ‘hostile’ et le laisse sortir. Dos au mur, à côté de l’embrasure, Swansea se laissa glisser jusqu'au sol. Ramena ses genoux contre son torse, les enlaça de ses bras. Lorsque le vampire entrerait, il ne le verrait pas tout de suite, qu’une fois la porte refermée.

Son esprit se concentra sur la musique ; S’il trouva le récit particulièrement glauque, il apprécia néanmoins la voix de la chanteuse, fascinante. Le titre prit fin, le silence retomba. Bien vite rompu par les bruits d'une clé que l'on introduisait dans la serrure.

« Je suppose que vous n’avez pas plus lugubre, dans votre répertoire, autre que l’histoire de Kavus ? C'était ironique. Mauvaise tactique. Dans la bordure, c’est surtout la vie que l'on chante.  » Ajouta t-il, dans un effort accort. Au souvenir des mélodies fredonnées par les vieilles, dans les camps, pour consoler les marmots.   « Je n’ai pas fait exprès. » Coup d'oeil aux miettes du bibelot qui prônaient en évidence sur la surface plane.




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31.01.22 15:57

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« J’espère bien que vous ne l’avez pas fait exprès ! Nous ne nous connaissons pas assez bien pour briser de la vaisselle. »

Interloqué, Tommen qui avait franchi le seuil à nouveau seul, laissant ses intermédiaires dans la rue sans leur indiquer son adresse encore une fois, observait la silhouette mortelle tapie dans son univers. Il faudrait s’y habituer, mais qu’est-ce qui lui avait pris de s’agiter ainsi ? Encore un peu et il se serait rongé la patte pour échapper au piège, cet animal affolé. Le Conseiller avait l’air de le surveiller mais en réalité, il cherchait l’odeur du sang dans l’air. A jouer avec des morceaux de verre, tout pouvait arriver. Mais non, rien. Un soupir de soulagement purement mécanique lui échappa, simulacre de l’expulsion d’air chargé de tension qui aurait pu signaler son retour à la sérénité, des siècles plus tôt.

« Vous auriez pu vous couper. Et j’ai eu du mal à sortir cette pièce de métal de la serrure, »
ajouta-t-il en laissant tomber au sol le morceau de lame brisé. Honnête comme un comptable, mais habile comme un braqueur de coffres ; il n'était pas l'Infant de Lady Rodgers pour rien. « J’espère que vous êtes fier de vous. »

Un sourcil froncé fut toute l’étendue de sa remontrance ; il n’allait pas se montrer sévère envers les premières tentatives de communication d’un nouveau colocataire, si maladroites et destructrices soient-elles. Ce n’était pas comme s’il était réellement en danger, après tout.

Incertain, il disposa sur le tapis devant le feu le matériel destiné à sustenter le jeune homme : un réchaud surmonté d’une plaque d’ardoise, une pièce de jambon séché dont l’odeur piquante l’incommodait légèrement, un pot de miel, une flasque de liqueur d’herbes, un sachet de papier qui contenait des fruits et du pain, une gourde de métal actuellement vide… Il se rappela les consignes évoquées par l’intermédiaire : rincer avant d’utiliser. Allons bon. Il disposait tout de même d’une arrivée d’eau, non pas destinée à donner à boire aux éventuels invités mortels de son logis, mais à remplir une bassine où il se lavait ; il espérait que l’eau était potable mais c’était la même qui circulait à travers le bâtiment, alors pourquoi pas. Machinalement, il porta sa main à ses lèvres pour absorber un peu du breuvage, avec une hésitation qui trahissait son manque d’habitude. Le goût ne lui indiquait rien. Il se mordilla la lèvre, pris en défaut de manière flagrante, et revint en tendant le récipient plein, dans l’espoir que l’esclave saurait éclairer sa lanterne.

« Au moins vous n’avez pas essayé de me tuer. J’apprécie. Pour la peine, je ne vous réclamerai pas de sang ce soir. Vous vous nourrirez seul. »

De son pas lent, mesuré par l’observation continue des détails qui l’entouraient de mille informations, il gagna un mur auquel il s’adossa, mains croisées dans le dos, pensif. Il ne surveillait pas réellement son invité mais regardait à travers lui, le regard presque vide. C’était un grand mystère que la nuit recelait là. Une nouvelle guirlande d’obligations dont il ne mesurait pas encore toute l’étendue.
Seul ?
Pas seul dans la pièce. Seul à apaiser sa faim.

« J’espère que cela ne vous dérange pas si je m’assure de vos habitudes. Il faut bien que j’apprenne à vous connaître. Cela m’évitera de vous malmener sans l’avoir souhaité, » ajouta-t-il avec un sourire aussi aimable qu’il lui était possible en prononçant de telles paroles. Quant au reste des articles, vêtements de rechange et autres accessoires, ils étaient restés emballés dans les sacs déposés devant la cheminée, en un jeu involontaire sur l’esprit de la saison et les anciennes coutumes d’offrandes qui l’avaient accompagnée, dans des temps plus légers et plus libres.

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14.02.22 23:26

Aloysius Swansea
A difficult man [Swansea] 02f098555aa24dd4501b5097bb5108e46b81724d
֎ Diem natalis : Libre.
֎ Officium : Dominic C
֎ Matricule : NA5038901
֎ Nuntium : 893
֎ Adventus : 17/08/2018
֎ Multicomptes : None
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Aloysius Swansea
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« A difficult man  »





Un rictus éclaira sa goule lorsque Tommen lui fit des reproches. « Fier, sans plus. Puisque je n’ai pas réussi à foutre le camp. » De loin, il suivit les agissements du vampire, l'observa poser ses courses au pied de la cheminée. Après une brève hésitation, il s'empara de la gourde tendue, renifla son contenu - Habitude tenace de sauvage que celle de sentir avant d'ingérer, associée à l'absence de confiance. Ne captant aucune odeur suspecte, il se risqua à boire lorsque Nosferatu se détourna de lui ; C’est que le stress lui avait donné soif. « Il me faudrait un peu plus de recul pour pouvoir espérer vous tuer. Méfiez-vous, cela pourrait arriver. Je sais comment l'on procède. » Le flegme dont il fit preuve en déclarant cela était surprenant, tout comme le regard de poisson mort qu'il lança à Hodgkin. Le pire, c'est qu'il était vraiment capable d'essayer, quitte à foirer sa tentative. Comme lorsqu'il avait apostrophé Darius.

« Et je regrette, mais je n'ai pas à vous fournir en sang ; je ne suis pas un calice ! Contesta t-il, tout en se levant. Il délaissa la gourde sur l'un des meubles. Vous avez probablement un compte à la banque de sang, non ? Eh oui, je suis au fait des règles de cette cité. Les saignées nécessiteront d'ailleurs que je sorte d'ici. Vous ne voudriez pas être en défaut au regard de la loi, n'est ce pas ? » C’est pour ces raisons, qu’il avait quitté New Bellingham pour New Abbotsford. Pour ces "lois" qui protégeaient d'une certaine façon le statut des humains, totalement inexistantes sous le joug d'Ezekiel, ce triste sire en maudit satyre.


Accroupi auprès des articles disposés à son attention, il les examina. Snoba la bouffe, parce que l'appétit lui faisait défaut. La faim lui reviendrait probablement plus tard, une fois ses émois apaisés. Il tiqua lorsque Tommen argumenta ; Comment pouvait-on chahuter quelqu'un involontairement ? Et puis, apprendre à le connaitre nécessitait-il de l'observer ainsi ?  « Attendez ; Vous n’allez tout de même pas m'étudier de la sorte en permanence, rassurez-moi.. ? C'est gênant. J'ai besoin d'une zone personnelle. » L'absence de pièce annexe le contrariait réellement  : cela signifiait être constamment scanné par le regard fauve de cet homme. Même lorsqu'il dormirait, échoué sans défense. Aloysius avait besoin de sa bulle. « Il me faudrait une corde de sept pieds, trois pitons et deux ou trois couvertures. Pensez-y, la prochaine fois que vous effectuerez des commissions. Si vous ne me les ramenez pas, j'irais les chercher moi-même. » Il avait déjà un plan en tête, mais ne le dévoila pas au caïnite. Parce qu'il était peu probable que celui-ci accepte voir s'édifier dans un coin de son antre, un espèce de … "Nid". « Vous ne pensez tout de même pas que je vais porter ce genre de chose ? » Il souleva en évidence un chemisier blanc, soyeux. Impossible qu'il endosse ce genre d’étoffe ; il garderait probablement ses nippes un bon moment.





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16.02.22 22:27

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Les bras croisés, l’expression absente, Tommen retourna dans sa tête pendant une demi-seconde les articles réclamés, et les vit se disposer d’eux-mêmes dans l’espace – des pitons, c’était pour fixer aux murs ou au plafond, trois, c’était pour dessiner une forme triangulaire dans un coin, les cordes dessineraient ce triangle en reliant les pitons, les couvertures reposeraient fatalement dans ce triangle… c’était un hamac qu’on lui réclamait, comme ceux où dormaient les pauvres gens sur les bateaux ? Fantaisiste, mais cela lui rappellerait d’anciens modes de vie. Il n’aurait pas imaginé cette grande gueule téméraire se blottir dans un espace aussi… mignon, à défaut d’un autre terme. Enfin soit. Ça ne lui coûterait pas bien cher. Il y avait même des améliorations faciles à apporter à un tel plan de base. Il se contenta de hocher la tête.

« Je ne regrette pas de vous avoir choisi, vous êtes non seulement un battant mais aussi un petit malin. En revanche je ne comprends pas ce que vous reprochez à ces habits. Mais je peux vous prêter des miens en attendant de trouver mieux, je suis sûr » il haussa un sourcil autoritaire « que vous saurez en prendre soin. Quant à un espace intime, ne pouvez-vous pas vous contenter des paravents ? »

Il laissa s’écouler quelques secondes pesantes, puis gagna une bibliothèque et actionna une commande qui fit pivoter un pan de mur. Il adorait ce genre de jouets, c’était le summum de ses loisirs d’architecte, articuler la pierre et lui donner vie pour qu’elle se disloque et se reforme en un véritable tour de magie. Il aimait en montrer la souplesse et la légèreté, contrairement à la première impression massive et immuable qu’elle pouvait donner.

« Après vous. »

Il passa devant une bifurcation du couloir – celle qui plongeait dans les profondeurs de la terre pour rejoindre l’un de ses bien-aimés passages secrets, et conduire à l’extérieur de la ville pour de prudentes escapades – et sa main se posa quelque peu lourdement sur l’épaule du mortel, comme s’il craignait de le voir partir en courant. Bien sûr, ce dernier ne pouvait pas savoir où cette porte menait, et même s’il l’avait su, le prédateur des ombres l’aurait rattrapé sans grand effort ; ce genre de traque était, après tout, sa seconde nature.

« Nous n’irons pas de ce côté tout de suite, » affirma-t-il. « Je n’aimerais pas que vous attrapiez froid : je suis encore plus mauvais médecin qu’hôte, si vous pouvez l’imaginer. »

Ces petites pointes d’auto-dérision qu’il s’autorisait prouvaient qu’il était tout sauf inquiet ; il ne s’esclaffait pas, mais c’était sa manière de montrer de l’humour. Enfin, il se doutait bien que s’il interdisait une porte de son domaine souterrain à Swansea, ce dernier serait fasciné précisément par celle-ci au détriment de toutes les autres ; il commençait à cerner cette partie de son caractère, un certain esprit de contradiction. Il valait mieux lui témoigner de la valeur des autres pièces, pour tenter de ramener son attention dans leur direction.

« Je garde ici des objets qui ne sont pas censés être en ma possession, » déclara-t-il avec une désinvolture paisible en ouvrant un autre bureau, plus spacieux mais plus encombré. « Je n’y reçois pas les gens, comme vous pouvez l’imaginer. Vous pourrez y être tranquille… Si vous promettez de ne rien endommager. »

Même en ne conservant presque rien, que les cadeaux précieux offerts par des êtres chers, au bout d’un certain nombre d’années de vie on finissait fatalement par entasser des bricoles. C’était le cas ici. Notamment si c’était de la variété en matière vestimentaire que le nouveau venu cherchait, il était à la bonne adresse. Tommen, lui, qui connaissait cet endroit par cœur, n’observait que l’humain ; ses yeux expressifs, ses déplacements,  ce qu’il dévoilait franchement, ce qu’il cherchait à cacher. Cet homme adulte pourtant et normalement proportionné ressemblait à une sorte de chat de gouttière, tout juste assez bien élevé pour errer parmi vos étagères sans causer trop de destructions. A ce propos, il y avait réellement ici toutes sortes d’objets qui auraient pu être mis à profit pour le tuer. Il se demandait vaguement, sans conviction, si une tentative sérieuse serait faite en ce sens. Il n’en avait absolument pas peur, parce qu’il n’y croyait pas.

« Je vous conseille plutôt de pendre votre hamac ici, » déclara-t-il soudain en montrant un coin du plafond, au-dessus d’un coffre clouté sur lequel reposait une collection de pierres semi-précieuses, rangées par teintes à la façon d'un nuancier. « Je ne pense pas que mes visiteurs, pour peu que j’en aie, soient intéressés de contempler vos installations, ni vous leur physionomie. Mais j’espère bien que vous me gratifierez tout de même de votre présence de temps en temps. »

Comme à chaque fois qu’il faisait même une très lointaine allusion à une forme de sympathie, il détourna le regard au loin et se perdit dans l’observation de quelque chose d’anodin, en l’occurrence une ancienne carte au mur. Décidément, Orontius Finnaeus avait vraiment créé un monstre, en inventant ce super-continent reliant l'Australie à la Terre de feu. Mais l'idée d'un Antarctique habitable avait quelque chose de fantasquement séduisant. Réellement une autre planète.
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06.03.22 22:48

Aloysius Swansea
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« A difficult man  »




Son regard se promena sur le costume couleur corbeau de son interlocuteur lorsque ce dernier proposa de lui prêter ses affaires. Sauvage enclavé ne se voyait pas du tout porter ni adopter ce genre de dress code, trop rigide. Il laissa tomber le vêtement qu'il avait entre les mains, se redressa. « Ça ira, je vais me contenter de l’uniforme du Transitoire. » A défaut de ses frusques de plouc, inélégantes quoique confortables.  Au sujet des paravents qu’il jugeait trop ouverts, Swansea répondit par un  non catégorique - Il ne pourrait s'en satisfaire.


Quelque part dans les murs, les rouages d’un mécanisme se mirent en branle ; le bruit de la pierre contre la pierre gronda et un passage secret se matérialisa sous les yeux ébahis du mortel. C’est avec précaution qu'il s’engagea dans le couloir, le nocturne sur les talons. Lorsque la paluche de celui-ci se posa sur son épaule en un geste significatif, Aloysius regarda Tommen du coin de l’oeil. Tiens donc… Sur quoi aboutissait ce corridor pour que l'accès lui soit ainsi défendu, avant même qu'il n'amorce un mouvement pour s'y diriger ? Le courant d'air frais qui provenait de cette artère l'interpella. Et s'il feinta l’innocence, il se jura d’aller rôder dans le secteur lorsqu’il en aurait l'occasion.  « Prions pour que je ne tombe jamais malade, dans ce cas. »  


Ce cabinet avait l’allure d'un bazar, malgré qu'il s'agissait plutôt d'un musée du souvenir.  « Je ne fais jamais de promesses lorsque je ne suis pas certain de pouvoir les tenir. » Dit-il distraitement, tout occupé qu'il était à lorgner le bordel bien rangé. « Mais j'essaierais de faire attention. » Il ne jouerait pas plus longtemps au difficile ; Cette pièce lui convenait - il s'en accommoderait, en attendant de se carapater. Et elle lui permettrait au moins de se soustraire à l’autre, à sa convenance.  

« Il ne s'agissait pas d'un hamac, mais d'une simple tente ; Puisque vous me "dédiez" cette pièce, je n'en vois plus l'utilité. Néanmoins, je tiens quand même aux couvertures.  » C'est qu'il n'allait tout de même pas pioncer à même le sol ! « De temps en temps... ? C'est une notion très subjective. » Voulait-il dire, une visite une nuit sur deux ? Plus, moins ? C’est que Swansea était capable de se retrancher ici longtemps ; L'absence d'interactions sociales ne le dérangeait pas outre mesure. De ce fait, il était fort probable que le “de temps en temps” se traduise par des visites très occasionnelles, espacées de délais interminables. Ou pas. « On verra. Pas ce soir en tout cas ; A défaut de pouvoir dormir, j'aimerais au moins me reposer, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. La soirée a été mouvementée. » Fausse excuse. Il s’approcha de la porte restée entrouverte, l’ouvrit un peu plus grand, invitant le nocturne à sortir. « Bonsoir, monsieur. »




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11.03.22 0:54

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C’était un très vilain garçon que cet esclave. Refuser un bon costume quand on lui en offrait un ! Mais ceux que Tommen s’obstinait à porter depuis des temps qu’aucun humain n’avait connu, ni son père, ni son grand-père, n’étaient peut-être pas de son goût. Bah. Quand il lui ferait un peu plus confiance, il l’emmènerait en ville, une nuit où il n’aurait pas trop à faire. Ce serait l’occasion de savoir ce qui se passait  dehors, vestimentairement parlant, un peu mieux qu’en évitant du regard les silhouettes sur son chemin et en se disant qu’ils étaient tous étranges. Enfin, pas tous. De loin en loin, il y avait d’étonnantes petites touches de bon goût, et pas forcément chez les plus anciens. Il tenait à garder… comment disait-on ça déjà ? L’esprit ouvert. Enfin, pas au-delà de toute raison bien sûr, il ne fallait pas exagérer…

« Je ne prie pas, mais vous n’avez pas l’air de quelqu’un qui tombe malade facilement, » dit-il à voix basse. « Eh bien, passez une bonne fin de soirée. Ne démolissez rien d’autre, s’il vous plaît, je tiens beaucoup à tout ce que j’entrepose ici. Eh bien, c’est pourquoi je l’y entrepose. Inutile de préciser. »

Il était encore difficile d’équilibrer entre le fait de ne rien dire du tout, et celui de lister ses pensées à voix haute. Mieux valait en effet se retrancher dans son rôle de Conseiller et de financier. Ce serait infiniment reposant. Tommen se rendit dans l’antichambre, après avoir vérifié une dernière fois que l’entrée du souterrain était convenablement cadenassée. De toute façon, le mortel avait paru avoir froid à ces abords, donc il ne chercherait sans doute pas à s’y exposer à nouveau. On lui avait expliqué quelque chose à propos des chats un jour, mais il ne s’en rappelait plus précisément. D’ailleurs il n’aurait jamais ramené un chat chez lui. Pourquoi ? Il ne savait pas au juste, mais quelque chose lui disait que la cohabitation aurait été plus que houleuse. Un rat de laboratoire, pourquoi pas. Ou une petite souris grise.

Le retour à ses livres de comptes, à sa plume et à son encre fut un réconfort et un soulagement. Il y avait au moins une partie de cette planète qui continuait à tourner comme elle l’avait toujours fait en sa présence. Les valeurs chiffrées s’organisaient en bel ordre froid sur ses étagères mentales, et il pouvait presque oublier que dans un coin de l’appartement, une petite souris invisible cherchait sans doute à creuser quelques galeries… Mentalement aussi, uniquement. Il fallait l’espérer.

Tommen quitta le logement pour aller au travail et découvrit ce malaise diffus à l’idée d’avoir abandonné ses installations, son repaire, toute la sécurité et la  richesse qu’il s’était octroyées, entre les mains d’un colocataire dont la fiabilité n’avait absolument pas été démontrée. Quelques lapsus inattendus firent tourner les regards des uns et des autres à la Tour cette nuit-là. Mais on était accoutumé à ce que quelques bizarreries se produisent de loin en loin. Et puis, dernièrement, des rumeurs commençaient à courir au sujet de messire Hodgkin. Qu’il traversait une mauvaise passe.

Il l’avait traversée, se répétait-il en rajustant sa cravate. Et quand il revint chez lui avec l’impression du travail bien fait, aux premières lueurs de l’aube, il ne lui restait plus maintenant qu’à essayer de trouver le soleil en ignorant la présence de la petite souris. Cela dit, en rouvrant la porte, il devait bien admettre qu’il appréhendait ce qu’il allait trouver.
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28.03.22 20:15

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« A difficult man  »




Une fois le notable hors de la pièce, Aloysius expira un air chargé de désarroi. L'homme était comme résigné - L’heure n’était plus à la résistance active - Il ne se précipita pas dans le couloir comme un dératé, n'essaya pas de braver l'interdit. Mais s’empara des vêtements remisés là, les étala au sol, en couches successives et s’y installa, las. Il n’accorda qu'un intérêt succinct aux objets qui l’entouraient ; C’est qu’il aurait désormais tout son temps pour le faire.

Bougon esseulé rumina longtemps dans sa moustache avant que la fatigue ne vienne le cueillir. Son menton, progressivement, vînt reposer sur son torse et il s’endormit ainsi, adossé à un coffre aux mille trésors. Eut un sommeil particulièrement agité. Et lorsqu'il rouvrit les yeux et reconnut les limites de son nouveau boudoir, le mal être, subitement, refit surface - Qu'ils étaient loin les murs décrépis de sa masure, par lesquels filtrait tout en douceur la lumière naturelle. Ici, dans cette antre absurde, il n'était entouré que de parois grises : les ténèbres prédominaient.

Allongé sur sa paillasse, la conscience quelque peu ensevelie sous le spleen, Swansea posa ses agates sur la collection de pierres de Tommen. L'une d'entre elles accrocha son regard ; Une pierre aux reflets irisés, comme un ciel de printemps. Il se redressa, puis alla choper la Labradorite, dont il ignorait absolument tout, de son origine jusqu'à son nom. Le galet gagna sa poche ; il se l'appropria, parce qu’il lui plaisait.



*



Si sauvage bouina un temps dans sa piaule, il finit par en sortir. S'en alla rôder dans le corridor, progressant à tâtons dans le boyau obscur où il aboutit sur une grille verrouillée. N'eut d'autre choix que de revenir sur ses pas, pour se risquer cette fois dans la pièce de vie. Maître des lieux étant absent, l'enregistré agit librement ; à tout hasard, il alla chatouiller la poignée de la porte, toujours fermée à clef. Décidé à tuer le temps, il alluma un feu, mimant les gestes du vampire - c'est que les flammes avaient le mérite d'égayer un minimum l'endroit.


Il prit place derrière le bureau, disposa sur les livres de comptes la pièce de jambon. A l’aide de la lame qu’il avait cassé la veille, il cisela la viande en tranches fines, se mit à grailler barbaque. Il attrapa l’un des carnets de cuir qui reposait sur la surface plane, l’ouvrit. S’il voyait les pages griffonnées, il peinait à distinguer ce qui y était recensé ; Ses culs de bouteille étaient restés dans la bordure. En plissant les yeux, il parvint cependant à distinguer des séries de chiffres. Interminables. Se demanda à quoi tout cela pouvait rimer. Était-ce à cela, que ce Tommen occupait son immortalité ? Employant la plume qui baignait dans l'encrier, Swansea scribouilla l'une des dernières pages du livret. Apparue en un tracé grossier une typographie enfantine, inculquée dans la bordure lorsqu'il était haut comme trois pommes ; la tête à toto. Le visage ainsi représenté était totalement hermétique…Presque semblable à celui du vampire. Vampire qui découvrirait cette pitrerie ultérieurement. Pour alors, gredin serait loin - à la maison.   


Il était installé dans un fauteuil face à la cheminée, lorsque le nocturne revînt au bercail. Dans sa paume tournoyait la Labradorite, aux couleurs magnifiées par les lueurs du feu. « J'ai très mal dormi. Vous avez pensé aux .. » Il se tût, après avoir jeté un coup d'oeil à Hodgkin et constaté que, non, il n'avait pas de couvertures en sa possession. « à priori non. » Il reprit sa contemplation. « Quelle heure est-il sous le soleil ? » Il marqua une pause. « C'est que vous m’avez privé de tous mes repères. »






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