Well, show me the way (lucius)

@Lucius Malkavian & Fitzwilliam

Prêtre, assieds-toi faut que je te parle, j'ai passé ma journée dans l'noir. Prêtre, je le sens, je le sais, je le suis, il se fout de moi, ouais

Sa querelle avec Ji Ok n’avait pas suffi. Sa discussion à bâtons rompus avec Wanda n’avait pas suffi. Sa rencontre avec le Baron n’avait fait qu’empirer la chose. Le Lieutenant-Colonel s’était promis de se reprendre, de ne pas céder trop facilement à l’enivrement, ceci d’autant plus qu’elle n’était que fugace et n’engourdissait sa douleur et ses errements que de manière extrêmement temporaire. Il aurait dû déposer le flacon qu’il avait saisi avant que ce dernier ne déboule sur le marché noir mais l’envie s’était faite plus pressente et il avait injecté le produit dans ses veines plutôt que de se conformer à ses obligations juridiques. Il ne se reconnaissait plus. Il n’était plus le même depuis trop longtemps et la culpabilité se mêlait au dégoût de lui-même. La boisson, la drogue, le travail étaient des échappatoires qu’il pensait pouvoir maîtriser. Mais tout comme son corps, ses gestes et ses pensées, il en devenait chaque jour un peu plus esclave sans avoir la moindre mainmise. Dans un état de semi-conscience, c’est avec surprise qu’il constata que ses pas l’avaient amené devant l’église de New Abbotsford. Catholique de naissance, il l’était également d’habitude, ayant passé un marché secret avec Dieu pour respecter ses valeurs mais s’épargner les litanies obscurantistes. Son regard s’éleva sur le clocher où il savait que se dissimulaient les trois carillons qui rythmaient la vie de tout être croyant. La plus légère des cloches avait-elle résonné pour lui lorsqu’il était venu au monde ? Il ne saurait le dire tant avant l’arrivée de ses parents adoptifs, il ne s’était jamais senti aimé et attendu. La seconde cloche avait justement raisonné à deux reprises pour lui, le tintement de la joie et du bonheur qui ne duraient malheureusement jamais longtemps. Par deux fois, il avait juré d’aimer et de chérir. Par deux fois, c’était la mort qui les avait séparé. La troisième, la plus grosse au son lugubre, il l’avait entendu à de multiples reprises mais jamais pour lui-même. Il y avait des jours, il espérait pouvoir entendre son chant lourd de plomb.

Heureusement pour lui, ça n’était pas l’un de ces jours.

“Hé oh !” s’exclama-t-il en entrant en titubant dans l'édifice gothique, manquant de trébucher et de faire tomber au passage le lourd porte-cierge où des âmes égarées et esseulées avaient adressé leurs prières silencieuses. Il renifla, sentant déjà les picotements de ses sens qui revenaient. Il en était hors de question. Rapidement, il se signa avant de poursuivre son chemin avec plus ou moins de succès et de ligne droite avant de s’effondrer à moitié dans le confessionnal, sans prendre garde au fait qu’il s’était installé du mauvais côté. En d’autres termes, plutôt que pénitent, il était à la place du confesseur, les paupières mi closes et prêt à déverser tout ce qu’il avait sur le coeur et dans son esprit embrouillé avant que le courage et les volutes d’alcool et de drogue ne s’évaporent. “Pardonnez moi mon Père car j’ai péché.” gémit-il. “Je n’ai pas pu la sauver alors que c’est grâce à elle que je suis en vie. J’aurai dû prêter plus attention à ma mère et je n’ai pas su venir à son secours avant qu’il ne soit trop tard. Et j’aurai dû la transformer pour éviter qu’elle ne meurt.” Il ne se rendait pas même compte qu’il tenait des propos décousus, ses péchés se mêlant les uns aux autres alors que des larmes carmins commençaient à humidifier ses paupières, traçant des sillons sur ses pommettes. La figure maternelle se mariait avec celle de son épouse, toutes les femmes de sa vie qu’il n’avait pu sauver.  “Elle ne voit pas le danger qui rôde autour d’elle et je n’aurai pas dû porter le premier coup. Je ne devrai pas lui en tenir rigueur mais s’il avait accordé plus d’attention à son Enregistrée, elle serait encore en vie.” Sa volonté de protéger la Conseillère Bozena qu’il admirait avec emphase se mêlait à sa colère résonnant à l’encontre de son vieil ami dont l’esclave avait contaminé son épouse humaine de la Fièvre Rouge et entraîné son décès. “C’est mal d’avoir ce genre de pensée. Elle ne mérite pas que je l’oublie aussi vite.” Tel une hirondelle dont l’aile frôle la surface plane du lac, le milicien évoquait avec pudeur ses récents émois contre nature. Il poussa un gémissement tel un enfant capricieux qu’il était demeuré malgré les décennies avant de se prendre la tête entre les mains et de s’effondrer à moitié sur le sol. “Je ne devrais pas être là.”

@Lucius Malkavian & Fitzwilliam

Prêtre, assieds-toi faut que je te parle, j'ai passé ma journée dans l'noir. Prêtre, je le sens, je le sais, je le suis, il se fout de moi, ouais

Pour une fois. Pour une fois seulement depuis qu’il a rejoint les rangs de la Milice. Depuis qu’il a embrassé la cause des enfants de la nuit, il lâche prise. Toute sa vie était bien rangée jusqu’à présent. Il avait certes fait son quota de bêtises durant sa mortalité et goûter les délicatesses de l’immortalité avec gourmandise. Mais il avait alors repris le contrôle sur lui-même et sur les autres. Depuis quelque temps, son équilibre semblait cependant chamboulé et il réalisait que les hautes tours de son esprit avaient été construites sur un sol marécageux de sorte qu’elles étaient prêtes à s’effondrer à la moindre secousse, au moindre souffle de vent. Les yeux clos, il se blottit dans la voix chaude et bienveillante de l’homme de foi, y retrouvant si ce n’est une certaine sérénité, à tout le moins un confort. Il ne sait rien de lui. Il ignore même son visage bien qu’en sa qualité de Lieutenant-Colonel, il connaît chaque membre de cette paroisse. Il devrait se méfier, refuser de se confier et tout garder pour lui mais il a besoin de lâcher prise. S’il ne le fait pas dans cet antre consacré, il craint les circonstances différentes d’un nouveau passage à l’acte. “J’adore l’odeur du napalm au petit matin.” explique-t-il dans une allégorie de son existence ces derniers temps. S’il brûle tout sur son passage, s’il se coupe progressivement de tout et de tous, peut-être viendra-t-on lui tendre la main. Ou peut-être cela fera moins mal aux membres de son entourage quand il ne sera plus là à son tour. Comme si son existence pouvait avoir le moindre impact sur autrui. Il a bien conscience de la réponse négative à cette pensée.C’était cependant sa seule manière de faire et de réagir quand tout devenait trop.

Les mots de l’ecclésiastique font sens évidemment. Les risques que son épouse puisse survivre à la transformation étaient particulièrement risqués, plus encore compte tenu de la maladie. La question n’avait d’ailleurs jamais été abordée. Au- delà de tout l’amour qu’il pouvait lui porter, l’éternité n’était pas envisageable. Malgré les rimes induites, un amour ne pouvait durer toujours, à l’exception de celle liant une mère à son fils. La meilleure preuve en était la meurtrissure encore béante depuis la disparition de Livia. “Elle…” Il déglutit, incapable de formuler à voix haute ce qu’il lui était arrivé pour la simple et bonne raison qu’il n’en savait pas davantage. Évidemment, il avait tenté de découvrir ce qui était advenu de celle qui avait veillé depuis aussi longtemps qu’il se souvienne de lui. Mais les atrocités du laboratoire Squibb ne lui avaient pas permis d’aller plus loin. Il n’avait pu qu’imaginer ce qui était advenu de sa mère. “Ma mère faisait partie des victimes des laboratoires Squibb.” poursuivit-il, rassemblant ses pensées de la meilleure manière qu’il pouvait. “J’étais en Asie lorsqu’elle a été enlevée et lorsque j’ai appris sa disparition, je suis revenu le plus vite possible.” Les larmes de sang coulaient le long de ses joues sans qu’il ne cherche à les maîtriser. Il laissait le flot de ses émotions l’inonder ce soir. “Je l’ai cherché partout. J’ai tout fait pour la retrouver.” Il laissa retomber son visage entre ses mains. “C’était trop tard. Je n’ai pas pu la sauver.”

Tout comme il ne parviendrait pas à sauver Wanda. Elle était forte, brillante, intelligente et la plus capable de régenter la Cité. Il n’avait pas vocation à la protéger : elle savait se débrouiller seule et l’avait prouvé à de multiples reprises. Il ne se sentait pas capable d’avouer sa faiblesse. Volontairement, incapable de vocaliser la position occupée vis à vis de sa supérieure hiérarchique, il se laissa porté par d’autres pêchés dont il n’était guère fier. “Tout ?” interrogea-t-il, la voix rendue malhabile par les drogues qui continuaient à se diffuser dans son cerveau. “Je…” Il se racla la gorge, mal à l’aise d’évoquer ce genre de sujets en ce lieu saint. “J’ai eu…” Ses prunelles brunes glissèrent sur le bois puis sur ses mains, incapable de regarder ailleurs, sentant l’écoute attentive du Tout-Puissant par l’oreille de son serviteur. “J’ai eu des pensées impures. J’ai désiré.” Habituellement, la luxure n’était guère un sujet tabou avec Fitz. Il s’agissait au contraire d’un sujet de conversation des plus légers qu’il égrenait avec ses hommes. Mais les choses s’étaient compliquées. Son veuvage était loin d’être terminé. Il n’avait pas le droit de désirer sa supérieure hiérarchique. Et moins encore le Baron.